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« Everest » au sommet de la discorde

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« Tragédie à l’Everest » (« Into Thin Air ») De Jon Krakauer, édition 10-18, 1997

Everest de Baltasar Kormákur

Alors que le film gravit la tête du box-office et est encensé par les critiques, c’est un peu moins la joie pour l’auteur Jon Krakauer dont l’histoire du long-métrage est tirée. La nouvelle version cinématographique crée quelques points de discorde et ceci malgré le réalisme et la volonté du réalisateur Baltasar Kormàkur de retracer fidèlement cette aventure tragique, vécue par l’auteur et son groupe de grimpeurs en 1996.

C’est le summum
Premier point surprenant, alors que le scénario est clairement adapté du récit de Krakauer, le bouquin de ce dernier n’est même pas crédité au générique du long-métrage comme principale source. Dans le générique, il est simplement écrit, histoire tirée de faits réels. De quoi faire monter les tensions à leurs summums.

Mauvaise pioche
Deuxième point de désaccord se situe lui dans une scène jouée par l’acteur Michael Kelly qui interprète l’écrivain à l’écran. Dans un passage du film, celui-ci refuse d’aider ses équipiers à effectuer une tentative de sauvetage, car il est victime de cécité des neiges. : « J’ai jamais eu cette conversation » raconte Krakauer ! Il précise également que le comédien qui interprète son rôle, n’a jamais daigné vouloir l’approcher, ou de prendre contact avec lui, comme il est coutume de faire lors d’un tournage afin de s’imprégner du personnage et de son histoire.


À bout de souffle
L’auteur mécontent mais réaliste, admet sans mauvaise foi qu’il est en partie responsable de cela et regrette amèrement d’avoir vendu ses droits à Hollywood trop vite et surtout si peu de temps après la publication de son livre. En 1997 Sony achète ceux-ci et transforme rapidement l’histoire de l’écrivain alpiniste en un mauvais téléfilm du même nom, « Into Thin Air: Death on Everest » est certes visuellement peu crédible et est très mal interprété, mais il respecte toutefois l’histoire du journaliste d’Outside magazine et crédite son livre source dès le générique contrairement au nouveau long-métrage. Ceux qui l’ont vu, peuvent que constater les similitudes du déroulement de l’histoire conté par Krakauer entre ce téléfilm de 1997 et celui de 2015.

Lancer de piques
Le troisième point de discorde se centre sur l’alpiniste russe Anatoli Boukreev dit Toli dans le film, employé surhumain de Scott Fisher chez « Mountain Madness » qui n’est autre que l’entreprise concurrente de Rob Hall « Adventure Consultants ». Comme la version de celui-ci ne concordant pas avec celle de Krakauer, cela a créé une grande polémique, qui s’est soldée par l’écriture d’un livre intitulé « The Climb », publié en 1997, le récit de l’alpiniste russe contredit les aspects de celui de Krakauer qui deux ans après, va se défendre en rédigeant des changements qui seront ajoutés à son livre de poche, mais le grimpeur russe n’aura jamais l’occasion de répliquer, car il décède en 97.


Tête de pioche
Le dernier point de bisbille, se tourne vers le réalisateur du film Baltasar Kormàkur, qui quant à lui voulait être fidèle à l’histoire du groupe de gens qui ont vécu cette ascension tragique de l’Everest avant tout, et se défend en rétorquant qu’il s’est focalisé là-dessus. De son point de vue, il était également plus intéressant de raconter l’histoire de cette manière, plutôt que de reprendre à l’identique celle utilisée dans le livre qui est un récit à la première personne.

Mont et merveilles
Il est certes toujours très compliqué d’adapter un roman ou de retranscrire une histoire vraie sur grand écran sans changer ou déformer la réalité, d’autant plus que les buts d’un livre et d’un long-métrage ne sont pas les mêmes. Krakauer n’a pas pu s’empêcher d’écrire ce livre suite à son traumatisme, perturbé et marqué à vie par cette expérience à la fois spectaculaire et douloureuse, il se devait de conter celle-ci comme exutoire. Tandis que le long-métrage du réalisateur est plus centré sur les faits de cette expérience hors norme vécue par ce groupe d’alpinistes en quête de sensations fortes et de dépassement de soi. Visuellement, il se devait de faire quelque chose d’impressionnant et c’est surtout cet aspect-là qui est mis en valeur tout au long de l’histoire. Après tout cela, on peut comprendre qu’il a été difficile de faire le bon choix pour ce film et qu’il aurait été encore plus ardu de satisfaire tout le monde sans froisser la mémoire des victimes et des survivants. Toutefois, il aurait été juste aussi de mentionner le livre comme source.

Ascension finale
Ayant à la fois lu le livre et vu le film « Everest » on peut que vous encourager à aller voir la version cinématographique et à lire « Tragédie à l’Everest », tout deux captivants, intense et tragique et malgré les discordes et le manque de reconnaissance du film envers le bouquin, il est impossible de ne pas faire le lien entre eux, car ils sont tout deux très similaires et marquants et au final, en faire toute une montagne n’aura pas empêché le film de pointer au sommet.

Références :
*« Tragédie à l’Everest » Into Thin Air ») De Jon Krakauer, édition 10-18, 1997
*« The Clim, Tragic Ambitions on Everest », De Anatoli Boukreev, St Martins Press,1997
*« Into Thin Air: Death on Everest » Columbia TriStar télévision,1997
*« Everest » de Baltasar Kormàkur, Universal Pictures, 2015

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