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Vincent Perez : « Je voulais que les gens se rencontrent pour parler de cinéma »

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Déjà acteur et réalisateur dont l’emploi du temps est bien rempli, pourquoi Vincent Perez a-t-il choisi de se rajouter une activité supplémentaire ? Et pas des moindres ! C’est à lui que l’on doit ce défilé de stars du cinéma dans les rues lausannoises. Interview avec un organisateur fier de son festival et de ses invités de prestige.


Bonjour Vincent Perez ! Le festival « Rencontres 7ème art Lausanne », c’est un projet qui vous tenait à cœur depuis un moment. Aujourd’hui, c’est concret…
La cérémonie d’ouverture au Capitole a été particulièrement émouvante pour moi. Il y avait du monde et des personnalités du cinéma. Michel Hazanavicius est monté sur scène pour annoncer The Deer Hunter (Michael Cimino, 1978), film d’ouverture. Et à ce moment-là, assis dans l’obscurité, d’où je pouvais voir la salle remplie, je me suis dit : « Ah ouais, quand même quoi ! ». C’est super parce que c’est exactement ce que je voulais ! Que les gens viennent parler de cinéma pour le cinéma. Mais jamais, de ma vie, je n’aurais imaginé organiser un tel évènement.

Rien qu’en Suisse, il y a déjà beaucoup de festivals de cinéma, comme Zurich et Locarno pour ne citer qu’eux. Qu’est-ce qui fait la spécificité de « R7al » ?
Habituellement, dans le cadre de festivals, les réalisateurs passent peu de temps avec d’autres réalisateurs. C’est aussi une des raisons pour laquelle certains, on en marre de recevoir des invitations à tout bout de champ. Ici, c’est tout le contraire, car ils ont l’occasion de parler cinéma entre eux. L’âme de ces rencontres donne l’énergie de ce festival lausannois. Sans compter qu’il y a une proximité palpable avec le public qui vient voir les films, souvent en compagnie des réalisateurs. L’autre soir, Christopher Walken était assis au Capitole pour voir « The Deer Hunter ». Le public était avec lui et c’était magique ! Michel Hazanavicius, pareil. Quand il est venu parler de sa carrière au public de l’ECAL (Ecole cantonale d’art de Lausanne), la salle était pleine ! Je crois que les gens aiment cette proximité avec de grands noms du cinéma et c’est quelque chose que je veux préserver.

Quel évènement vous a inspiré pour lancer ces rencontres de cinéma ?
Sans doute le festival du film de Lyon (initié par Thierry Frémaux, délégué général du Festival de Cannes), où l’on retrouve cette proximité entre public et invités. Les Rencontres de la photographie d’Arles m’ont aussi servi d’exemple, même si aujourd’hui, ça commence à devenir un peu trop massif. Moi, j’aimerais pouvoir garder ce côté intimiste.

L’organisation du festival est quand même titanesque. Ceux qui travaillent dans l’ombre nous ont confié qu’ils ne dormaient presque pas tant il y a à faire…
Je confirme. La première nuit, j’ai dormi à peine trois heures et la nuit dernière, quatre heures seulement. C’est le prix à payer pour être présent et s’occuper de nos invités.

Mais vous avez l’air d’être une petite équipe… Combien de personnes contribuent au bon déroulement du festival ?
Je ne pourrais pas vous dire exactement… En tout cas, on n’est pas assez ! (rires) Il y a clairement un manque d’effectif. On n’a pas fait suffisamment de pub non plus. Mais bon, c’est la première édition donc on apprend. On fera mieux l’année suivante.

« J’aimerais pouvoir garder le côté intimiste de ces rencontres »

Vous parlez déjà de l’année prochaine, c’est donc sûr qu’il y aura d’autres éditions ?
Ah oui oui ! L’idée est que ces rencontres perdurent. Je me suis fixé trois ans. Si dans trois ans ça ne marche pas, j’arrête. Mais bon là ça marche déjà. Les amoureux du cinéma me remercient parce qu’ils vivent des trucs incroyables. En y réfléchissant, j’ai encore des projets comme centrer l’évènement en un seul lieu. Construire comme une sorte de grand dôme où les gens se rencontreraient pour parler cinéma pendant la durée du festival.

Mais comment avez-vous convaincu toutes ces stars de venir ici, à Lausanne ? 
Beaucoup sont des amis. Avec Michel Hazanavicius par exemple, on est copains alors je l’ai appelé et il a tout de suite accepté de venir. Par contre, Darren Aronofsky, je ne le connaissais pas avant. On lui a tout simplement envoyé une invitation en lui présentant le projet et il a également répondu présent. En tout cas, nos invités sont enchantés, E-N-C-H-A-N-T-É-S ! Hier, certains sont allés faire un tour en hélicoptère en Valais, ils ont trouvé ça incroyable ! Ils repartent tous avec une belle image de la Suisse. L’autre soir, Barry Levinson a adoré finir la soirée au Manoir de Charlie Chaplin à Corsier-sur-Vevey. C’est aussi ça r7al.

Quand on pense au cinéma et à la Suisse, on pense forcément à Jean-Luc Godard, qui manque à l’appel. Il ne fait pas partie des invités du festival… Lui avez-vous proposé de venir ou avez-vous eu peur d’essuyer un refus ? 
Non, on ne l’a pas invité. Et je ne crois pas qu’il en ait très envie. On verra bien l’année prochaine si ça se fait. Même, s’il en disait du mal, ça ferait de la pub ! (rires).

« On parle de cinéma dans une région sublime, que demander de mieux ! »

Dans le cadre de ces rencontres de cinéma, vous proposez aussi des conférences sur la réalité virtuelle. La considérez-vous comme le présent du cinéma ou comme quelque chose encore d’encore lointain pour le 7ème art ?
Disons qu’on est au tout début de la réalité virtuelle. Dans l’avenir, la réalité augmentée risque de prendre beaucoup de place et de vraiment changer la vie des gens. On n’a même plus besoin de mettre casque et tout se passe devant soi en 360°.

Mais peut-on encore appeler cela du « cinéma » ?
Non, ce n’est plus du cinéma ! Le cinéma, le vrai, restera toujours le CINÉMA. On a beau mettre des machins en relief [3D], le principe consistera toujours en une image que l’on projette sur un écran, devant un public. Le but du cinéma est et restera de raconter une histoire dans un cadre. En revanche, avec la réalité virtuelle qui propose une image à 360°, on est dans une immersion totale. J’admets qu’il y a tout de même ce geste volontaire de poser une caméra pour raconter quelque chose. Donc c’est quand même une intention qui s’apparente au cinéma, mais les codes narratifs sont complètement différents. Dans la réalité virtuelle, il n’y a plus de champ-contrechamp. C’est ce genre de débats qu’on essaie de soulever avec ces conférences sur le virtuel proposées dans le cadre du festival.

« On a beau mettre des machins en relief [3D], le cinéma restera toujours le CINÉMA »

Ces jours, on parle de Vincent Perez en tant qu’organisateur de ce festival, mais vous avez surtout une carrière de réalisateur et d’acteur. Quelles ont été vos grandes rencontres au cinéma ?
En tant qu’acteur, j’en ai eu pas mal. Forcément, Depardieu, Deneuve, Adjani,… Mais j’ai eu de très belles rencontres avec des réalisateurs comme Patrice Chéreau, Régis Wargnier ou encore Jean-Paul Rappeneau. Sans oublier Michelangelo Antonioni… Avec lui, c’était immense ! Tout ce qu’on a vécu en travaillant ensemble était extraordinaire ! Quand j’étais plus jeune, ils étaient déjà des exemples pour moi. Ils le sont encore aujourd’hui.

Lorsque vous parlez de vos débuts, vous évoquez souvent Pierre Gisling, également réalisateur, qui vous a aidé à entrer dans le monde du 7ème art…
Disons qu’à l’époque, il m’a libéré de ces limites que je me créais moi-même. Enfant, dans mon petit village de Penthaz, je me disais que c’était impossible, que jamais je ne pourrais percer au cinéma et réaliser mes rêves. Je regardais passer les rares voitures françaises avec les yeux qui brillaient. Je savais que c’était à Paris que je devais aller si je voulais faire carrière. Le Capitole faisait partie de ces endroits où je pouvais me laisser rêver.

Vous avez récemment confié à Darius Rochebin que, depuis que vous aviez quitté la Suisse dans vos jeunes années, Lausanne s’était incroyablement bien développée sur le plan culturel. Aujourd’hui, si vous aviez 20 ans, pour percer au cinéma, est-ce que vous seriez resté en Suisse ?
En tant que réalisateur, je pense que oui. Aujourd’hui, il y a beaucoup d’écoles de réalisation. Je pense que j’aurais tout fait pour aller à l’ECAL. Par contre, pour une formation d’acteur, je serais quand même parti.

Si aujourd’hui vous vivez encore à Paris, c’est pour le bien de votre carrière ?
C’est difficile de répondre à cela… Mais non, je ne dirais pas que c’est pour le bien de ma carrière. Maintenant, j’ai toute ma vie là-bas. Mes amis sont à Paris. Franchement, je ne travaille pas énormément en France, mais plutôt à l’étranger. D’ailleurs, je reviens de deux tournages, l’un en Chine et l’autre en Australie. Et puis, j’ai un rapport un peu particulier avec le cinéma français… Mais on développera tout ça la prochaine fois ! Je vous laisse sur votre faim ! (rires)

[Interview réalisée en collaboration avec Lauren von Beust]
Pour plus d’informations sur le festival : r7al.ch

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Amoureux du film «American Gigolo», ses parents la prénomme en hommage à l'actrice américaine Lauren Hutton. Ainsi marquée dans le berceau, comment aurait-elle pu, en grandissant, rester indifférente au 7ème art ? S'enivrant des classiques comme des films d'auteur, cette inconditionnelle de Meryl Streep a prolongé sa culture en menant des études universitaires en théories et histoire du cinéma. Omniprésent dans sa vie, c'est encore et toujours le cinéma qui l'a guidée vers le journalisme, dont elle a fait son métier. Celle qui se rend dans les salles pour s'évader et prolonger ses rêves, ne passe pas un jour sans glisser une réplique de film dans les conversations. Une preuve indélébile de sa passion. Et à tous ceux qui n'épellent pas son prénom correctement ou qui le prononcent au masculin, la Vaudoise leur répond fièrement, non sans une pointe de revanche : «L-A-U-R-E-N, comme Lauren Bacall !». Ça fait classe !

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