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jeudi, avril 18, 2024
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Favela Olimpica : excellent, mais le spectateur risque de vouloir en voir plus.

Etienne Rey
Etienne Rey
Travailler pour une salle de cinéma, comme journaliste pour des médias ou organiser des événements pour le 7e art, ma vie a toujours été organisée autour de ma passion: le cinéma.

Se sentant plutôt à l’aise avec le réel, Samuel Chalard, ancien diplômé de l’ECAL, a d’abord réalisé des petits films de commande. Des court-métrages pour des architectes ou des musées et divers travaux qui l’ont formé au documentaire.


Il y a quelques années, en considérant les tristes vestiges laissés par les Jeux olympiques de Sarajevo ou d’Athènes, l’étudiant devenu documentariste chevronné trouve l’idée de son prochain projet cinématographique. Il parlera de l’héritage laissé par les grands événements sportifs dans les villes qui les accueillent, des changements dont les autorités des citées candidates rêvent et de leur impact général sur la population indigène. Après une difficile période de recherches de financement, il trouve du soutien moral et pécuniaire auprès de son confrère et ami producteur Frédéric Gonseth (réalisateur par ailleurs d’un autre excellent documentaire de 2017, « La Bataille Du Gripen ») qui le conforte dans son idée de se concentrer sur les prochains Jeux olympiques de Rio Di Janeiro. Le cinéaste part alors au Brésil et découvre une petite communauté solidaire regroupée légalement dans une favela située là où devra bientôt se dresser l’opulent village olympique.

Il pose sa caméra et ses micros dans la « Vila Autódromo », une petite cité autonome construite autour des rêves de quelques originaux. Là-bas, il y rencontre des individus qu’on « invite » quotidiennement à quitter leur foyer en échange d’un nouveau logement ou d’une indemnisation. Pourquoi ? Parce qu’ils sont installés au mauvais endroit. Juste là où la communauté olympique prévoit amener trax et pelleteuses. Bien sûr, tous ne sont pas prêts à laisser tomber sans résister la maison qu’ils ont bâti eux-mêmes, au fil des années, avec sueur et conviction marginale. Dans ce combat qui rappelle, celui de David contre Goliath, Samuel Chalard trouve un sujet en or. Certes la lutte est noble mais va-t-elle durer suffisamment longtemps pour que le réalisateur trouve toute la matière nécessaire à un long-métrage documentaire ? Petit coup de pouce du destin, les habitants sont coriaces et vont poursuivre la bataille durant deux ans. En gros, jusqu’à l’ouverture des joutes… Le temps pour l’artiste et son équipe technique de se fondre dans la masse, se faire presque oublier et surtout de créer des liens amicaux et sincères qui vont faire tout le sel de cet excellent film témoin.

Sans cette belle complicité construite avec les protagonistes, l’auteur aurait-il vraiment pu se permettre de filmer les larmes et les accolades de ses sujets en colère ou en pleurs ? Rien n’est sûr…

Plus pragmatiquement et techniquement parlant, le film est également à la hauteur de ses ambitions morales et civiques. Samuel Chalard, qui ne pouvait physiquement pas être partout au bon moment, a mandaté d’autres opérateurs pour capter les grands remous de la favela et ne rien manquer des troubles qui s’y opéraient. Serge Pirodeau, resté sur place, (ou pas loin), assurait les imprévus alors que Patrick Tresch, le directeur photographie, compilait l’ensemble des images pour livrer de quoi faire aux monteurs. Lorsque, par exemple, certains protagonistes s’agitent contre les représentants de l’autorité venus les expulser, ces derniers ont même pu utiliser des images tournées par les habitants-résistants de la « Vila Autódromo » pour montrer la grossièreté des échanges. Pourtant, le film n’est pas à charge et s’efforce de rester neutre, même si la position de l’auteur reste claire. Il est du côté des laissé-pour-compte mais pourtant plusieurs scènes donnent la parole à la partie adverse. Comme par exemple ces séquences de battage consensuel avec le maire de Rio qui semble convaincu du bien-fondé de ses démarches d’expulsion. Même s’il a le droit au même traitement que les autres protagonistes, à un temps d’antenne au moins aussi important, et même à du respect et de la considération, il est clair que Samuel Chalard se positionne du côté des victimes… Et c’est tant mieux.

Tel qu’il est, le film est excellent, mais le spectateur risque de vouloir en voir plus. Il souhaitera peut-être suivre ses protagonistes. Il voudra sûrement savoir ce que sont devenus ces personnages à qui l’on a promis monts et merveilles. Des logements ou des indemnités ? Où vivent-ils désormais ? Quand dorment-ils ? De quoi se nourrissent-ils ? Que font-ils ? Autant de questions auxquelles pourraient volontiers répondre une suite.

Favela Olimpica
CH   –   2017   –   93 Min.   –   Documentary
Réalisateur: Samuel Chalard
Acteur:
Outside Box
06.12.2017 au cinéma

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