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mardi, mars 19, 2024
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« Les Éblouis » : un embrigadement sectaire pour toute une famille

Vincent Rohrer
Vincent Rohrer
« Je suis un passionné de cinéma depuis ma plus tendre enfance, et j’ai grandi avec les films de ma génération à savoir les années 80-90. Les films de Steven Spielberg et Joe Dante font parti de ces longs-métrages dit cultes et qui pour la grande majorité sont entrés au Panthéon de la pop culture. Ma passion pour le 7ème art est née grâce à ma maman et mon oncle qui m’ont fait découvrir des pépites sur grand écran. À côté de ça, j’apprécie énormément la nature et son « silence » cela me permet de me ressourcer. Dans un autre registre, j’adore photographier les couchers de soleil où que je sois. J’affectionne énormément les bords du lac et les couleurs célestes de fin de journée. »

« Les éblouis » nous montre le déchirement d’une famille lambda qui entre dans une communauté religieuse. Dès la scène d’ouverture du film, on aperçoit la fragilité de la mère et la passivité du père face à son épouse. Cette fragilité fera sombrer toute cette famille dans les méandres de ce que l’on pourrait appeler communément : une secte.

À 12 ans, Camille est pleine de vie, malgré le fait que sa mère traverse une période difficile. Camille est souvent ramenée à sa position d’aînée : on compte sur elle pour comprendre mieux que ses frères et sœurs que la vie n’est jamais simple et qu’il faut parfois se sacrifier pour ceux qu’on aime… Ses parents se rapprochent d’une communauté religieuse chrétienne dont les actions et le mode de vie reposent sur le partage et la solidarité. Ils s’y investissent de plus en plus jusqu’à venir y habiter. Peu à peu, les interdits surviennent et l’embrigadement devient sectaire. Camille est contrainte de se plier aux règles de la communauté (dictées par un curé des plus malsain – Jean-Pierre Darroussin est exceptionnel) qui lui ordonne d’arrêter les cours de cirque qu’elle affectionne tant. La jeune fille doit accepter un mode de vie qui remet en question ses envies et ses propres valeurs.

Ce premier film de Sarah Suco est en partie autobiographique : la scénariste et réalisatrice a grandi dans une congrégation de ce type. Le point de vue adopté est toujours celui de Camille – interprétée par la talentueuse Céleste Brunnquell, celui d’une enfant donc, naïve, critique, mais jamais totalement jugeant. La réalisatrice considère que tout n’est pas mauvais dans ces communautés et c’est souvent sous couvert de bonnes actions que les limites sont franchies vers l’inacceptable.

Le film raconte ce glissement, complexe et fascinant, vers la dérive sectaire. Il est finalement très simple de se faire embrigader lorsque les besoins sont présents en nous (ici le mal-être de la mère en recherche de sens et de reconnaissance et un père totalement passif) et qu’un groupe nous attire par de belles idées et la force d’un soutien collectif. La position observatrice de Camille permet au spectateur de percevoir les absurdités mises en exergue par le dispositif.

« Les éblouis » touche ainsi parfaitement sa cible, porté par beaucoup d’émotions et une jeune comédienne époustouflante qui tient quasiment à elle seule tout le film sur ses épaules. Le long-métrage captive durant toute sa durée. Nous sommes littéralement acteurs au même titre que Camille, et suivons sa descente aux enfers de ce soi-disant paradis. Il est intéressant de voir l’évolution de Camille : son passage de l’enfance à l’adolescence, de la naïveté à la maturité. Camille qui prend le rôle de mère auprès de ses frères et sœurs.

L’instinct maternel est plus fort que tout et il est ici mis en exergue avec brio. Camille Cottin est brillante dans le rôle de la mère, et, Eric Caravaca convainquant dans celui du père. La réalisatrice a su toucher avec son premier long-métrage et on ne peut que se réjouir de la suite.

Les éblouis
FR – 2019 – 99min
Drame
Réalisateur: Sarah Suco
Acteur: Camille Cottin, Jean-Pierre Darroussin, Éric Caravaca, Céleste Brunnquell, Spencer Bogaert
Agora Films
20.11.2019 au cinéma

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