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samedi, juillet 27, 2024
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Interview : Germinal Roaux, un poète en noir et blanc

Le réalisateur Germinal Roaux met en scène l’immense acteur zurichois Bruno Ganz, et la jeune actrice Kidist Siyum Beza. Ticket gagnant pour le lausannois qui a remporté deux prix à la Berinale ! FORTUNA raconte en noir et blanc la fuite d’une adolescente migrante qui trouve refuge auprès de frères chanoines, à plus de 2000 mètres d’altitude…


Avez-vous tout de suite pensé à Bruno Ganz en écrivant le rôle du directeur de l’hospice ? Comment l’avez-vous convaincu de prendre part au projet ?
Tout est allé très vite. ! J’ai parlé de ce désir de travailler avec Bruno Ganz à ma productrice (Ruth Waldburger) assez tôt dans le processus. Comme on s’en doutait, Bruno est très sollicité, mais nous avons eu la chance que le projet l’intéresse, et il a de suite demandé à me rencontrer. Il avait surtout besoin que je le rassure sur ma capacité à mener le projet au bout.

Comment s’est passé le travail entre ce monument du cinéma et Kidist Siyum Beza, encore novice ?
Ils ont réussi à accorder leurs violons. Kidist nous a été recommandée suite à une brève apparition dans Lamb de Yared Zeleke. Tout comme Assefa (Assefa Zerihun Gudeta) qui joue le rôle de Kabir, elle a très vite compris ce que je cherchais.

Comment a-t-elle réagi à la lecture du scénario ?
Elle n’a pas reçu le scénario, car je souhaitais travailler avec elle de façon un peu différente. Trois semaines avant le tournage, chaque jour, je lui racontais l’histoire du film. Et le lendemain, je lui demandais de me la raconter à son tour. Dans ces allers-retours, j’ai pu me nourrir de sa vision des choses pour construire son personnage. À l’inverse, Bruno Ganz m’a dit qu’il apprendrait le scénario à la virgule près.

Quelle a été la genèse du film ?
Les discussions avec ma compagne qui travaille avec des mineurs non accompagnés. Je les ai rencontrés, j’ai écouté leurs histoires bouleversantes de traversées. De là, plusieurs choses se sont ensuite greffées au film, notamment la thématique du passage à l’âge adulte.

L’utilisation du N/B est très maîtrisée… Peut-on en savoir plus sur les images plus lyriques qui évoquent la traversée de ces jeunes migrants ?
Tout comme les garçons et les filles que j’ai rencontré, le personnage de Fortuna ne parle pas beaucoup. Et ce sont parfois des enfants qui se raccrochent très fort à la religion. Ce lien à l’invisible, je l’ai aussi transposé dans ces images obsédantes de la traversée. Ce sont presque des images bibliques, « d ‘une terre noyée », comme le dit la voix de Fortuna.

C’est suite à la lecture d’un article de presse que vous avez cette idée de centrer le récit autour d’une communauté religieuse…
Oui, il s’agissait du monastère d’Einsiedeln, en Suisse allemande, qui avait décidé d’ouvrir ses portes à des réfugiés. J’ai tout de suite pensé à l’Hospice du Simplon, que j’ai souvent photographié. En hiver, on dirait un bateau échoué dans une mer de neige ! Au-delà de l’aspect religieux, comment faire le Bien pour l’autre est une question qui m’intéresse beaucoup. Les réflexions autour de l’accueil, du Bien et du Mal ne sont l’apanage d’aucune religion.

Comment les chanoines ont-ils accueilli l’idée qu’un film se tourne chez eux ?
Comme ils vivent en autarcie, loin du tumulte, ils étaient dans un premier temps plutôt réticents. Puis ils ont lu le scénario… L’histoire les a touché et dès que leur décision a été prise, ils nous ont ouverts leurs portes d’une façon magnifique !

Un souvenir du tournage ?
Le tournage de la scène de descente de police. C’était une nuit très éprouvante ! On a travaillé de six heures du soir à six heures du matin, dans le froid. Avant cette longue nuit, on a organisé un grand souper dans l’Hospice du Simplon. On devait être un peu plus de huitante personnes. Il y avait les comédiens, les frères chanoines, des dizaines de figurants qui venaient de partout (Syriens, Somaliens, Afghans). Et tout le monde échangeait sur le film et son message. À ce moment là, je me suis senti très privilégié de faire du cinéma.

Pas de spoiler, mais cette phrase prononcée par Fortuna à la fin du film : « Comme le printemps qui revient toujours, comme dans la nuit qui devient jour, j’entends tes pas derrière moi »

Cette phrase à une signification particulière…
Je pense qu’en Occident, nous avons un peu perdu cette vision des choses. J’ai toujours senti en Afrique une confiance profonde en la vie et en la nature. On sait que le printemps va revenir, qu’il y a des cycles et qu’il faut avoir confiance en l’avenir.

De nouveaux projets ?
C’est encore trop tôt pour en parler, mais j’ai plusieurs projets en développement, oui. Je vous tiens au courant !

Fortuna
CH   –   2017   –   Drama
Réalisateur: Germinal Roaux
Acteur: Kidist Siyum Beza Bruno Ganz Yoann Blanc
Vega Distribution
11.04.2018 au cinéma

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