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vendredi, avril 19, 2024
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Ainsi va la vie à bord du Redoutable…

Jonathan Tholoniat
Jonathan Tholoniat
« Désespoir, amour et liberté. L’amour. L’espoir. La recherche du temps perdu. » Comme Pierrot, j’aime la Littérature. Comme Godard, j’aime le cinéma. Après avoir étudié la Philosophie à l’université de Lyon III, je poursuis mes études en Master de Littérature et français moderne à Genève pour me diriger vers l’enseignement et le journalisme. L’écriture et le cinéma : un univers en perpétuel mouvement que je suis heureux de partager. Godard ne disait-il pas : « Avec le cinéma, on parle de tout, on arrive à tout ». De quoi assouvir mon inlassable curiosité.

Adapté des romans Une année studieuse et Un an après d’Anne Wiazemsky, ex-épouse du célèbre réalisateur, Jean-Luc Godard, Le Redoutable de Michel Hazanavicius restitue avec hommage et irrévérence la radicalisation politique du cinéaste…


« La nouvelle vague c’était lui : Jean-Luc Godard »
Le célèbre réalisateur tourne son quatorzième long-métrage La Chinoise avec Anne Wiazemsky, la femme qu’il aime, de seize ans sa cadette, jeune étudiante en philosophie. La réception du film à sa sortie déclenchera chez Godard une profonde remise en question. En phase de réinvention, le cinéaste sera entrainé par les révoltes et l’esprit révolutionnaire de Mai 68 qui l’amèneront à se tourner vers un cinéma hors système aussi incompris qu’incompréhensible, pesant sur son histoire d’amour…

« Elle s’appelle Anne et c’est elle qui a décidé de raconter notre histoire »
Étant inspiré des romans d’Anne Wiazemsky, il fut évident que la narration du Redoutable soit tout d’abord pris en charge par le personnage d’Anne, délicieusement interprété par Stacy Martin. Il est tout de fois regrettable de voir sa parole et sa vision s’amenuir face à la présence écrasante de Godard ( Louis Garrel ). Elle est une sorte de point fixe qui disparait petit à petit face à ce « redoutable » à la dérive. D’ailleurs, comment peut-il en être autrement quand il s’agit de Godard, et d’autant plus lorsqu’il est magnifiquement interprété par Louis Garrel ? Cette histoire d’amour se transforme inévitablement en une vision caricaturale des bouleversements qui s’opèrent chez Jean-Luc Godard à la fin des sixties, condamnant inexorablement la voix d’Anne à n’être qu’imperceptible, voire muette.

« Exagérer c’est commencer d’inventer »
Michel Hazanavicius exagère la réalité pour nous offrir un pastiche maîtrisé à travers une fiction un peu décevante. S’il devait y avoir un hommage, ce n’est pas dans le scénario que nous le retrouverions, mais dans les multiples emprunts à Godard, comme les couleurs « pop », les récurrentes transgressions narratives – ou métalepses filmiques -, les mots filmés en gros plan, comme pour mettre en valeur le thème énoncé, les sons qui perdurent alors qui ne le devraient pas ou qui sont volontairement atténués pour se concentrer sur l’essentiel.

Si nous considérons à l’instar de Gilles Deleuze que chaque film de Godard est l’occasion de se poser de nouveaux problèmes, alors nous voyons très bien qu’Hazanavicius tente à juste titre d’illustrer les mécanismes d’une sempiternelle évolution intellectuelle, politique et cinématographique. Cependant, nous n’avons malheureusement pas assez accès à son travail, à ses véritables réflexions, à Godard en tant que tel.

En retranscrivant une partie de sa vie, Michel Hazanavicius livre donc moins un hommage au réalisateur qu’une comédie pour tout public. C’est ainsi que « Godard » s’effondre pour ne laisser place qu’à un « Jean-Luc » puéril, prétentieux et capricieux. Une caricature qui frôlerait l’irrévérence quand nous prenons conscience de l’immense œuvre du cinéaste. Or, selon Hazanavicius, il s’agirait plutôt d’une « trahison », afin de pouvoir reconstruire. Le réalisateur utilise les inventions formelles de Godard pour réinventer un personnage dans le cadre d’une fiction centrée sur le comique, la dérision et le satyre. Louis Garrel ajoute, lors d’une conférence au festival de Cannes, qu’ « il s’agissait d’imaginer comment on raconterait une vie intime de quelqu’un qui a une présence forte dans la mémoire collective ». Une imagination à la puissance comique dont il faut se délecter, mais qu’il ne faut pas trop prendre au sérieux…

Si vous n’avez pas vu ce film dans les salles, nous vous conseillons, malgré ces quelques critiques, de vous le procurer ne serait-ce que pour admirer le jeu exceptionnel des acteurs – notamment celui de Louis Garrel -, contempler le sublime hommage formel et visuel de Michel Hazanavicius à Godard et vous amuser de l’humour omniprésent, propre au réalisateur d’OSS 117.

Le Redoutable
France – 2017
Réalisation : Michel Hazanavicius
Scénario : Michel Hazanavicius, d’après les livres d’Anne Wiazemsky
Distribution : Louis Garrel ( Jean-Luc
Godard ), Stacy Martin ( Anne Wiazemsky ), Bérénice Bejo NOTE : 3,75/5
( Michèle Rozier ), Micha Lescot ( Bambam ), Grégory
Gadebois ( Coumot ), Jean-Pierre Gorin ( Félix Kysyl )
Praesens Film
Date de sortie : 13 septembre 2017
Durée : 1h44

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