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vendredi, mars 29, 2024
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« Dalida » : laissez-la danser !

Lauren von Beust
Lauren von Beust
Amoureux du film «American Gigolo», ses parents la prénomme en hommage à l'actrice américaine Lauren Hutton. Ainsi marquée dans le berceau, comment aurait-elle pu, en grandissant, rester indifférente au 7ème art ? S'enivrant des classiques comme des films d'auteur, cette inconditionnelle de Meryl Streep a prolongé sa culture en menant des études universitaires en théories et histoire du cinéma. Omniprésent dans sa vie, c'est encore et toujours le cinéma qui l'a guidée vers le journalisme, dont elle a fait son métier. Celle qui se rend dans les salles pour s'évader et prolonger ses rêves, ne passe pas un jour sans glisser une réplique de film dans les conversations. Une preuve indélébile de sa passion. Et à tous ceux qui n'épellent pas son prénom correctement ou qui le prononcent au masculin, la Vaudoise leur répond fièrement, non sans une pointe de revanche : «L-A-U-R-E-N, comme Lauren Bacall !». Ça fait classe !

La réalisatrice Lisa Azuelos nous concocte un biopic sur Dalida, l’idole d’une génération. Fragile mais pas moins courageuse, la célébrité aura eu raison de cette icône de la musique.


Chanteuse à la voix d’or et à la taille de guêpe, dotée d’un charme du sud qui fait sa sensualité, Dalida fait ses premiers pas dans la musique au début des années 50. Sa popularité grandit au fil des ans et la scène semble être faite pour cette reine de beauté italienne à qui tout semble réussir. Pourtant, lorsque les projecteurs s’éteignent et que le rideau se baisse, le quotidien de Iolanda Cristina Gigliotti (son vrai nom) n’a rien d’étincelant. La vie ne cessera de la mettre à rude épreuve et les sacrifices auxquels elle devra faire face seront toujours plus lourds à porter. Derrière les paroles de ses chansons se cache une vérité symbole d’une profonde souffrance qui ronge cette femme courageuse au destin si fragile.

Ne cachant rien, le film ose débuter par la tentative de suicide de la chanteuse, douloureux épisode pour elle et ses proches. La réalisatrice française Lisa Azuelos annonce la couleur : elle veut parler de Dalida et rester fidèle à son histoire du début à la fin. Malgré la reconnaissance due à la star et l’hommage que le film lui rend, ce dernier se dessine au travers des multiples fréquentations de la chanteuse. Femme à hommes, Dalida a cherché toute sa vie un compagnon capable de la rendre heureuse. Mariée une première fois, elle n’est pas heureuse. Star malgré elle, Dalida aurait donné n’importe quoi pour mener une vie normale, semblable à celle des femmes de sa génération. Mais cet idéal de vie, elle a dû y renoncer pour être celle qu’elle est devenue. De tous les sacrifices, celui de donner naissance fut son plus grand regret.

Les années passent mais Dalida ne parvient pas à combler ce manque qui la ronge. Et les épreuves qu’elle endure se succèdent, se rapprochant de plus en plus de l’insurmontable. Après la mort de deux de ses compagnons, la chanteuse affronte sa réalité au quotidien, une réalité qu’elle doit tenter de dissimuler sur scène pour servir son public. Éblouie par les projecteurs, la chanteuse devient physiquement fragile et affaiblie, un état qu’elle déplore sublimement lorsqu’elle reprend le titre « Je suis malade » de Serge Lama.

Si elle pense parfois trouver la clé du bonheur, ce dernier se voit aussitôt détruit par le revers de la médaille du succès. Les sacrifices sont nécessaires quand on est l’idole d’une génération, son frère, et aussi manager, ne cesse de le lui rappeler. Ses repères bousculés, Dalida perd petit à petit le contrôle d’elle-même mais continue d’afficher un sourire éclatant et une certaine assurance sur scène. Mal-être d’une artiste alors en pleine ascension.

Contre l’opinion familiale, elle s’embrigade dans des histoires qui ne lui correspondent pas pour échapper à ce quotidien douloureux. Malgré sa popularité, Dalida est loin d’être comblée et peinera à donner un sens à sa vie. Celle pour qui l’amour était le meilleur des remèdes se voit hantée par des rêves brisés. De l’obsession perpétuelle d’être à la hauteur s’en suit l’anorexie, maladie dissimulable mais d’un pouvoir destructeur incommensurable. Le manque d’amour, l’incompréhension, l’abandon et la solitude la façonnent comme quelqu’un qu’elle n’est pas, et finiront par avoir raison d’elle un soir de mai 1987.

Inconnue du métier jusqu’à présent, l’italienne Sveva Alviti est une révélation. Elle incarne Dalida à la perfection. Sa ressemblance avec la légende de la musique est frappante : deux beautés italiennes. Sveva Alviti ambitionne de devenir actrice depuis longtemps mais aucun script ne lui avait été proposé auparavant. En bonne étoile, Lisa Azuelos lui offre un rôle sur mesure qui marque gracieusement ce début de carrière. Un regret tout de même : c’est certainement par peur d’écorcher les chansons que l’actrice a eu recours au playback sur les plus grands tubes de Dalida. L’émotion y est en revanche vive et réelle. La jeune femme n’a a priori aucun souci à se faire pour la suite. Une telle performance ne laissera personne indifférent.

À l’origine de ce beau film, Lisa Azuelos nous fait don de sa fragilité et de son admiration pour la chanteuse disparue. Habituée à relater les faits de famille dans « Comme t’y es belle ! » (2006) ou encore « LOL (Laughing Out Loud) » (2008), elle embrasse toujours le point de vue des femmes, pour lesquelles elle éprouve beaucoup de compassion. La quinquagénaire signe ici son premier biopic et pas des moindres. Quelque part, la réalisatrice se retrouve en Dalida, qui serait finalement la voix de toutes les femmes. Aimer et être aimée, une devise que Lisa Azuelos avoue partager avec la chanteuse depuis toujours. « Dalida » est le témoin du destin fragile mais courageux d’une idole des années 70, partie trop tôt.

Dalida
De Lisa Azuelos
Avec Sveva Alviti, Riccardo Scamarcio, Jean-Paul Rouve, Nicolas Duvauchelle
Pathé Films
Sortie le 11/01

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