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dimanche, octobre 6, 2024
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Franck Dubosc : « Je suis le genre de père à baisser les bras quelques fois »

Lauren von Beust
Lauren von Beust
Amoureux du film «American Gigolo», ses parents la prénomme en hommage à l'actrice américaine Lauren Hutton. Ainsi marquée dans le berceau, comment aurait-elle pu, en grandissant, rester indifférente au 7ème art ? S'enivrant des classiques comme des films d'auteur, cette inconditionnelle de Meryl Streep a prolongé sa culture en menant des études universitaires en théories et histoire du cinéma. Omniprésent dans sa vie, c'est encore et toujours le cinéma qui l'a guidée vers le journalisme, dont elle a fait son métier. Celle qui se rend dans les salles pour s'évader et prolonger ses rêves, ne passe pas un jour sans glisser une réplique de film dans les conversations. Une preuve indélébile de sa passion. Et à tous ceux qui n'épellent pas son prénom correctement ou qui le prononcent au masculin, la Vaudoise leur répond fièrement, non sans une pointe de revanche : «L-A-U-R-E-N, comme Lauren Bacall !». Ça fait classe !

Habitué des comédies, Franck Dubosc est plus que servi avec « Le Sens de la famille ». L’acteur de 57 ans se retrouve à sucer son pouce et à incarner la parfaite adolescente blasée, dont l’esprit demeure coincé dans le corps de son père. Rencontre.


Un matin, les Morel se réveillent avec un gros problème. Ils découvrent que l’esprit de chacun est coincé dans le corps d’un autre membre de la famille. Chacha, 6 ans, est dans le corps de Papa, tandis que Papa est bloqué dans le corps de son ado de fils, le fils dans le corps de la grande sœur, la grande sœur dans le corps de la mère, et la mère dans le corps de Chacha… Vous êtes perdu ? C’est pourtant de là que tout part.

Bonjour Franck Dubosc ! Dans Le Sens de la famille, vous incarnez tour à tour un père dont l’esprit regagne celui de sa petite de 6 ans, avant de jouer l’adolescente bloquée dans le corps de son Papa. Est-ce jouissif pour un acteur d’interpréter plusieurs rôles dans une seule et même narration ?
Jouissif… Je ne sais pas si c’est le mot que j’emploierais. C’est plutôt perturbant. Au bout de quinze jours de tournage, on s’est tous regardés, on ne savait plus où on en était. On s’est laissés diriger par le réalisateur Jean-Patrick Benes et il fallait vraiment lui faire confiance parce que c’est comme naviguer dans le noir. C’est franchement compliqué. Ce n’est que quand j’ai vu le film que je me suis dit: « Ah, ok, c’est réussi ! ».

En effet, c’est aussi assez perturbant pour le public. Comment ne pas se perdre dans ce cafouillage…
À un moment donné, j’incarne l’adolescente bloquée dans le corps de son père, donc le mien, et je me retrouve dans un vestiaire de rugby face à des hommes nus. Pour ces derniers, je suis censé être le même homme, sauf qu’à l’intérieur, je suis une jeune femme qui est en train de voir des zizis partout. Et pareil pour Alexandra Lamy. Elle est dans son corps de femme, alors que c’est moi, le père, qui suis bloqué à l’intérieur quand elle rencontre son amant. Alors oui, des fois, c’est compliqué pour tout le monde, on ne sait plus qui est qui.

« Il fallait que j’évite la caricature pour ne pas devenir un personnage efféminé »

Vous avez regardé des tutos sur YouTube pour devenir la parfaite adolescente blasée ?
Le réalisateur m’a d’abord montré tous les essais des filles pressenties pour jouer le rôle de Valentine. Et bizarrement, ce n’est pas ça qui m’a été le plus utile. En fait, on s’est  entraidés entre comédiens, on s’est beaucoup appuyé les uns sur les autres. Moi, j’ai montré à Mathilde Roehrich comment je jouais l’adolescente, et elle me disait ce qu’elle en pensait et comment elle l’aurait jouée si elle avait été à ma place. Pour ce rôle, il fallait que j’évite la caricature pour ne pas devenir un personnage efféminé. Si je mettais mis à exagérer, ça serait devenu un sketch, et ce n’était pas le but.

Ça n’a donc donc dû être facile pour un acteur qui approche la soixantaine de d’interpréter une gamine de sept ans…
C’était le grand écart, effectivement ! En plus, j’avais du mal à sucer mon pouce. Je l’ai  pourtant beaucoup fait quand j’étais petit, mais là, j’avais peur de me péter les dents. (rires)

« Je crois que si je devais changer quelque chose dans ma famille, ça serait moi ! »

Vous avez retrouvé Alexandra Lamy après « Bis » (2015) et Tout le monde debout (2018). Vous souhaitiez retravailler ensemble ?
Oui, mon désir de faire le film est venu d’elle. On m’avait proposé le rôle d’Alain Morel il y a longtemps, et j’avais commencé à lire le scénario, que je trouvais compliqué. Et puis un jour, j’ai croisé Alexandra, qui m’a dit : « Comment ça t’as pas fini de le lire ? Je vais jouer la mère, il faut absolument que tu fasses le père ! ». J’ai accepté tout de suite parce que je sais qu’elle est travailleuse et que c’est une bonne actrice. On est des bons compagnons de travail tous les deux et on s’aime beaucoup. Donc oui, Alexandra a été un des gros…, gros…

…Moteur… ?
Oui voilà, un moteur. Je ne sais plus parler français, tellement je travaille à
Hollywood ! (rires)

Dans la vie, êtes-vous le genre de père à faire le voeux de changer de famille, comme le souhaite Alain, au début du film ?
Je crois que si je devais changer quelque chose dans ma famille, ça serait moi ! (rires) Mais oui, un peu comme lui, je suis le genre de père à baisser les bras quelques fois. Je suis parfois négatif. Plutôt que de prendre les choses à bras-le-corps, j’ai tendance à être ce mec fataliste. Ce qui est idiot, mais j’ai tendance à être ça… Un con, quoi !

« On ne donne pas le même amour à un enfant au cinéma quand on est parent dans la vie »

Ils ont quel âge, vos enfants ?
Ils ont 45 et… Non, je plaisante ! (rires) Mes garçons ont huit et onze ans.

Et vous vous servez de votre expérience personnelle pour incarner un père ?
Pas particulièrement dans ce film-là, mais de manière générale, oui. En fait, être père, ce n’est pas inné, on le devient. Et je pense que les acteurs qui ne sont pas parents dans la vie, lorsqu’ils jouent les parents dans une fiction, ils essaient de créer un attachement n’est pas vrai. La tendresse que l’on a avec un enfant, on ne la travaille pas, elle ne se calcule pas, elle est là, naturellement. On ne donne pas le même amour à un enfant au cinéma quand on est parent dans la vie.

Quand on collabore avec de jeunes acteurs sur un film, on se doit justement de créer un univers qui se rapproche de celui de la famille ?
Généralement, oui, même s’il n’y a pas eu besoin de le faire tant que ça sur ce tournage, parce que même Rose de Kervenoaël, qui tient le rôle de la petite fille, est déjà très adulte dans sa tête. Elle est très mature, et même plus adulte que nous dans la vie !

Quand on regarde votre carrière au cinéma, vous êtes un habitué des comédies. Mais êtes-vous parfois attiré par des histoires plus sombres ?
Je viens de tourner un film au ton grave, dans lequel le personnage revient sur la mort de son père, alors que sa mère est, elle-même, en train de mourir. C’est un film pour la télévision. Je le précise parce que je ne suis pas sûr qu’au cinéma les gens auraient envie de me voir dans un tel registre. Je viens aussi de terminer mon deuxième film en tant que réalisateur, dans lequel je tiens un rôle assez sombre, justement. Alors, oui, j’y suis attiré, mais j’aime vraiment ce que la comédie provoque. J’ai acquis une notoriété grâce à elle. Avant de faire un contre-emploi, il faut déjà assumer son emploi. Il faut aller doucement et respecter le public, ne pas le tromper.

Le Sens de la famille
FR – 2020 – Comédie
Réalisateur: Jean-Patrick Benes
Casting: Franck Dubosc, Alexandra Lamy, Christiane Millet, Artus, Mathlide Roehrich, Ricky Tribord
Pathé Films
30.06.2021 au cinéma

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