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jeudi, mai 2, 2024
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Hunger Games – La Cacophonique Ballade du serpent et de l’oiseau chanteur

Jordi Gabioud
Jordi Gabioud
Le cinéma, c'est bien. Très bien, même. J'aime le cinéma, et trouver les bons mots pour le décrire.

Les Hunger Games reviennent cette année et nous proposent de découvrir l’origine de ces jeux de massacre. L’occasion de se voir une nouvelle fois refoulé à l’entrée de cet univers certes riche, mais trop inconsistant pour nous emporter.


La dixième édition des Hunger Games est lancée et Coriolanus Snow (Tom Blyth), futur tyran que l’on a connu dans les précédents opus, est désigné mentor du district 12. Il fait la connaissance de Lucy Gray Baird (Rachel Zegler), dont il aura la charge. Comment sortir vivant de ce nouveau jeu de massacre ? Le suspense ne tiendra pas longtemps.

Revenir sur la création et l’institutionnalisation du concept des Hunger Games était un pari risqué. Un pari mal engagé puisque le film, produit pour 100 millions de dollars, se révèle en dessous des trois précédents opus (respectivement 130, 125 et 160 millions). Un pari mal pensé aussi puisqu’il réalise un démarrage plutôt faible lors de sa première semaine. La mode du « battle royale » est-elle passée ? Il semblerait bien que oui.

Et cela est dommage, car c’est le seul avantage d’un film comme ce Hunger Games. La promesse de voir un groupe d’adolescents s’entretuer et pousser le spectateur à apprécier les forces et à craindre les faiblesses de chaque personnages porte en soi quelque chose d’éminemment cinématographique. La caméra fait exister chaque personnage, chacun peut développer une histoire et une personnalité par sa seule apparence et l’on se prend à s’attacher même à un figurant. De plus, la mise à mort porte en soi la promesse d’un spectaculaire que la saga dénonce tout aussi maladroitement qu’elle l’offre.

Pourtant, ce nouvel opus de la saga Hunger Games n’a rien de bien cinématographique. Et ce n’est pas la faute au film hollywoodien pour adolescent : le premier volet réalisé par Gary Ross bénéficiait d’un budget plus faible, mais savait pourtant composer avec ses décors et ses costumes pour offrir quelques images marquantes. Ici, la caméra est bien plus fonctionnelle qu’inventive. Il faut ajouter qu’elle semble desservie par un décor plus pauvre que de coutume ainsi qu’une penderie qui semble avoir été dépouillée avant tournage tant les costumes manquent de personnalité. Et dans Hunger Games, l’habit fait le moine. Ainsi, ce nouvel opus parvient à systématiquement saboter son propre concept. Ses personnages n’existent pas et son univers n’est jamais mis en valeur.

Mais le problème de ce nouvel opus est plus fondamental encore : le film tente de rendre crédible un système qui par définition n’a jamais été voué à l’être. Repensons à deux modèles du genre que sont le film Battle Royal (2000) de Kinji Fukasaku et le roman Marche ou Crève de Richard Bachman alias Stephen King. Deux œuvres qui justifient rapidement leur concept mis en place sans pour autant chercher à le rendre crédible aux yeux du public / lecteur. Le concept est un prétexte permettant surtout de développer la personnalité des individus et de produire, de porter un message politique à travers les interactions entre des caractères différents. La grossièreté du concept offre en son sein un large panel de subtilités sociales poussées à leurs extrémités, et tout cela de manière ludique.

Cet Hunger Games fait le choix de se démarquer du concept qui fait son succès : les jeux ne sont plus le centre d’intérêt, mais ils sont relégués à un épiphénomène relégué derrière les réels enjeux politiques de ce monde. En se distanciant de son concept, Hunger Games abandonne la matière pertinente à exploiter et se rapproche alors d’une dystopie classique, au message politique bien plus générique.

Mais, plus dommageable encore, en cherchant à rendre cohérent l’invention et la tenue des Hunger Games, le film décrédibilise l’ensemble de son univers. Un univers où un participant des Hunger Games peut proposer des modifications de règles la veille des jeux. Un univers où l’on doit gagner des points pour donner à manger et à boire aux participants des jeux, mais où les jeux ne sont pas pensés pour durer plus d’une journée. Un univers où l’on apprend aussi que le concept même des Hunger Games, et de tout le système politique mis en place à partir de cet événement, a été conçu par deux hommes complètement ivres un soir dans un bar. Se rend-on bien compte de la portée symbolique que l’on donne ainsi à cette saga ? Il est à espérer que non, ou ce serait du sabotage.

Nous pourrions nous étendre plus longuement sur la structure en trois actes particulièrement laborieuse, sur les envolées lyriques de Rachel Zegler à la gestuelle pensée comme un marketing tik-tok ou encore sur l’échec du film à transformer son protagoniste en futur antagoniste mais rien ne choque vraiment lorsque l’univers est déjà en lui-même non crédible.

La ballade s’achève ainsi et peut-être que les prochains Hunger Games devraient faire le deuil de leur concept. Certes il attire quelques curieux. Mais si le film souhaite abandonner ses personnages au profit d’une amourette sur fond d’enjeux politiques, peut-être devrait-il définitivement couper les liens et apprendre à grandir. En attendant, ce dernier volet peinera à ravir les fans, comme à toucher un nouveau public.

The Hunger Games – The Ballad of Songbirds and Snakes
USA – 2023 – Science fiction, Action, Aventure
De Francis Lawrence
Par Michael Arndt, Suzanne Collins
Avec Tom Blyth, Rachel Zegler, Viola Davis
Ascot Elite
15.11.2023 au cinéma

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