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samedi, juillet 27, 2024
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30ème double anniversaire « De mon voisin Totoro » et « du Tombeau des Lucioles » : Retour sur deux succès édifiants

Un énorme monstre kawaii tout gris avec des oreilles pointues et un large sourire, ça vous dit quelque chose ? L’illustre studio Ghibli célèbre ce mois d’avril les 30 ans tout rond de la double sortie de Mon Voisin Totoro (Tonari no Totoro), succès incontournable de Hayao Miyazaki qui offrit sa célèbre mascotte au studio nippon, et du sublime, mais bouleversant Tombeau des Lucioles (Hotaru no Haka) de Isao Takahata. Rien que ça ! À cette occasion spéciale, quoi de mieux qu’un retour commémoratif sur ces deux succès édifiants ?


Hayao Miyazaki

Le 16 avril 1988, le Japon assiste à la sortie simultanée en salle de, pas un, mais deux nouveaux long-métrages d’animation du studio Ghibli, « Mon Voisin Totoro » et « Le Tombeau des Lucioles », réalisés par chacun des deux co-fondateurs du studio nippon, Hayao Miyazaki et Isao Takahata. Face à la réticence des distributeurs qui craignent le flop d’un scénario moins ambitieux (en comparaison aux précédents Nausicaä de la « Vallée du Vent » (1984) et du « Château dans le ciel » (1986)), Totoro est proposé aux spectateurs en séance commune avec le « Tombeau des Lucioles » dont le succès était, pour sa part, d’ores et déjà assuré. Si la sortie cinéma ne consacre pas immédiatement le nouveau Miyazaki, sa diffusion à la télévision japonaise dès 1990 voit sa côte de popularité exploser, conquérant unanimement le cœur des petits comme des grands. Son personnage éponyme, Totoro, ne tarde pas à devenir ainsi l’emblème du studio et reste encore aujourd’hui l’une des mascottes préférées des Japonais. Succès critique également retentissant pour l’adaptation très fidèle par Takahata de « La Tombe des Lucioles » (1967), nouvelle semi-autobiographique du romancier Akiyuki Nosaka, et ce, malgré une distribution post-cinéma quelque peu laborieuse, notamment à l’international. La réussite de ce double pari osé consacre leur réalisateur respectif et assoit définitivement la réputation de qualité et de sérieux du studio dans l’univers de la production japonaise d’Anime. Un succès comparable pour deux films néanmoins bien différents et réalisés par deux maîtres de l’animation qui imposent chacun leur style caractéristique propre. Alors que Totoro vous embarque dans un univers contemplatif et féerique, le « Tombeau, des Lucioles » déchire votre âme par son réalisme crû.

L’histoire de Totoro met en scène le Japon des années 50. Deux fillettes, Satsuki et sa petite sœur Mei, viennent s’installer avec leur père dans la campagne, pour être plus proche de l’hôpital dans lequel séjourne leur mère malade. Dans un cadre reculé de la civilisation, où la nature et le mystérieux font forte présence, les deux sœurs découvrent l’existence de créatures aussi énigmatiques qu’attachantes, les totoros. Réaliste dans le style graphique mais résolument fantastique dans la narration, Miyazaki immerge le spectateur dans la beauté intacte de la campagne japonaise de son enfance et la richesse d’une nature omniprésente. Un voyage dans un certain espace, à une certaine époque, mais aussi et surtout au cœur du folklore et de la culture traditionnelle japonaise. Avec sa référence au mythe de la forêt primitive, plus explicite encore dans « Princesse Mononoké » (1997), regorgeant de créatures fantastiques ancestrales, kamis et yōkai, Totoro embarque son public dans une aventure onirique empruntant son univers à l’imaginaire collectif japonais. Miyazaki nous offre ainsi, au travers de son œuvre, tout à la fois un hymne à la nature, à la tendresse de l’enfance, à la magie de son insouciance et à la richesse du folklore de l’archipel nippon.

Si le « Tombeau des Lucioles » a lui aussi deux enfants pour héros de son histoire, l’horreur et le tragique de leur destin d’orphelins de guerre nourrissent chez le spectateur une expérience cinématographique radicalement différente. Tuant les clichés du dessin animée destiné à amuser les enfants, l’œuvre de Takahata est crue, à l’image de la guerre qu’elle dépeint. Durant l’été japonais 1945, un jeune adolescent, Seita, et sa petite sœur Setsuko, perdent leur parents dans les bombardements de Kobe. Ils se retrouvent seuls, livrés à eux-mêmes, pour affronter les atrocités de la guerre, pauvreté, famine et maladie, dans l’indifférente cruauté des adultes qui les entourent. Le film est bouleversant, déchirant. Le spectateur regarde avec une horreur grandissante, le sort cruel et inexorable qui attend les deux enfants, que l’innocence ne pourra sauver. C’est par la rare maîtrise de Takahata à marier réalisme et onirisme à la fois au niveau visuel et narratif, illuminant de moments de tendresse et de joie la noirceur de cette chronique macabre, que le « Tombeau des Lucioles » nous communique aux tripes le puissant symbolisme contradictoire de son titre.

À l’occasion de ce 30ème anniversaire de la sortie de ces deux monuments du studio Ghibli, nous pouvons également saluer la carrière phénoménale du studio nippon qui, avec 22 long-métrages d’animation produits dont 5 réalisés par Takahata et 9 par Miyazaki, a su imposer son talent et son génie dans l’univers des productions de films d’animation, et cela, bien au-delà des frontières de l’archipel. Si l’avenir du studio apparaît aujourd’hui quelque peu incertain, avec une succession qui ne semble pas forcément assurée, nous pouvons néanmoins être confiants pour l’avenir de l’animation japonaise en général. C’est du moins l’optimisme que laisse présager les récentes pépites nippones qui nous sont parvenues, en grandes pompes pour certaines. On pense immanquablement au nouvel anime de Makoto Shinkai Your Name (2016), mais aussi au plus discret « Dans un recoin de ce monde » (2016) de Sunao Katabuchi qui, par son image et sa thématique narrative fait inévitablement écho au style de Takahata. Et comment ne pas mentionner le pur descendant de la lignée miyazakienne, « Mary et la Fleur de la sorcière » (2018) de Hiromasa Yonebayashi, ancien collaborateur au sein du studio Ghibli, à qui l’on doit la réalisation des excellents « Arietty », le petit monde des chapardeurs (2010) et « Souvenir de Marnie » (2014). Mais force est de déplorer l’absence trop fréquente de ces petites perles à l’affiche des cinémas suisses ! Plus qu’à espérer que lumière soit mise sur ces nouvelles productions, bijoux de la postérité du Studio Ghibli.

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