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vendredi, mars 29, 2024
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Before We Vanish : regards aliens sur l’humanité : Kurosawa est de retour !

Après sa sélection à Cannes dans la section « Un Certain Regard », le dernier Kurosawa débarque au NIFFF. Before We Vanish, comme ses prédécesseurs, s’inscrit dans la ligne surnaturelle et fantastique du réalisateur et reprend les codes du genre – si tel est bien le bon terme pour désigner les « films à invasions d’alien » – pour s’en détacher et proposer quelques nouveautés surprenantes.


Comme dans Cure (1997), Charisma (1999), Kaïro (2000), Pulse (2006) et, plus récemment, Creepy (2016), l’univers du réalisateur japonais est celui de notre monde réel et contemporain, au sein duquel quelques bizarreries se dessinent… Ici, trois aliens à la forme humaine sont envoyés en reconnaissance sur Terre pour préparer une gigantesque invasion, et, pour ce faire, ils tentent de comprendre la race humaine en leur subtilisant des concepts : être soi-même, la famille, la violence, l’amour. Les trois personnages se rencontrent au fil de la narration, alors que leur entourage croit les voir sombrer dans la folie, et tentent de rassembler tous leurs semblables pour se partager l’ensemble des concepts chapardés.

L’idée de base est donc fort intéressante : comprendre la race humaine pour mieux l’envahir, ce qui permet de tracer à grandes lignes nos manières de penser et nos comportements terriens pour mieux en dégager l’étrangeté, voire même l’absurdité. Shinji, un des trois aliens, regarde la météo et imite les gestes aériens du présentateur dans une sorte de ballet ressemblant plus à du tai-chi qu’à une véritable prévision des zones de pluie ou de soleil, sous le regard effaré de sa femme Narumi qui ne comprend pas l’attitude de son mari. Dans la même idée, Sakurai, une alien adolescente, ne comprend pas que tuer des gens, c’est mal, et observe fusils après mitraillettes avec une fascination naïve qui fait à la fois froid dans le dos et rire nerveusement.

De fait, le choix de Kurosawa d’avoir deux des aliens incarnés par des adolescents est extrêmement prolifique. À l’âge où tout est remis en question, avec plus ou moins de violence, il est parfois difficile pour les jeunes de capter, mais surtout d’accepter la marche du monde telle qu’à l’heure actuelle. D’un doigt, ils saisissent concept après concept dans la tête des humains et intériorisent des schèmes et représentations complexes. L’effet est renforcé par la construction des plans qui se veut très géométrique : des poteaux, des barrières, des tubes, des formes rigoureuses qui s’entrelacent perpétuellement et semblent former un monde enfermé, une cellule dont les sentinelles sont précisément ces concepts. Ces derniers ont beau être partagés par tous, ils ne sortent pas de nulle part et ne sont pas à prendre à la légère. Kurosawa vient donc questionner leur origine, leur construction, le sentiment conscient de sécurité qu’ils nous donnent, tout comme les contraintes et dominations inconscientes qu’ils exercent sur chacun.

L’innocence qui se dégage de la démarche rend le tout presque léger, l’invasion à venir est reléguée au second plan. Beaucoup de comique dans la plupart des scènes, un comique absurde, méditatif; la caméra est souvent fixe, avec beaucoup de panoramiques, et le spectateur contemple avec plus ou moins de désarroi les codes du monde dans lequel il vit. Tous ces éléments qui fonctionnent très bien dans les trois-quarts du film sont tout à coup, dans les dernières quinze/vingt minutes, complètement renversés, et on bascule dans une suite de bides et d’incompréhensions. Les scènes finales du film sont soudainement peu crédibles, mal écrites, on tombe alors dans le kitsch et le besoin de trouver une fin coûte que coûte à cet ovni cinématographique qui jusque-là tenait en haleine et étonnait par son originalité. Un fameux « deux mois, plus tard, permet d’éluder plein de réponses et d’éviter de répondre à certaines attentes du spectateur. L’idée principale du film reste certes jusqu’à la fin, mais le ton casse avec ce qui a été présenté dans l’heure et demie précédente.

Le monde de Kurosawa est ici un monde dans lequel les règles de vie ne sont pas données, ne tombent pas du ciel, et la perte de repères qui peut déboucher sur des comportements déviants et inhabituels est questionnée, malaxée dans tous les sens, pour faire réfléchir tout un chacun sur ses principes, attitudes et comportements quotidiens.

 Before We Vanish (Avant que nous disparaissions)
Japan, 2017

De Kurosawa Kiyoshi
Avec Masami Nagasawa, Ryuhei Matsuda, Hiroki Hasegawa
Production Django Films
World sales: Wild Bunch (FR)

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