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jeudi, décembre 12, 2024
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« Bad Moms » : envies refoulées

Au premier abord, l’affiche de « Bad moms » laisse entrevoir un film à l’américaine comme tant d’autres, bourré de clichés, une sorte de révolution kitsch de mamans qui vont devenir « bad ». Mila Kunis joue Amy Mitchell, personnage portant le lourd flambeau de toute une armée de mères qui, chaque jour, amènent leurs enfants à l’école et vaquent à des occupations domestiques dont elles se passeraient volontiers mais auxquelles elles semblent enchaînées envers et contre tout.



Certes, on est loin de grands films à l’esthétique particulière et fort innovante qui abordent une thématique dont on récompensera l’audace et l’originalité lors d’une cérémonie cinématographique de renom. Pourtant, tout comme ces « bad moms » se donnent un jour le droit de dire un gigantesque oui à leurs envies refoulées, nous aussi parfois, critiques de cinéma qui nous languissons généralement d’œuvres d’art nouvelles, de réalisateurs ou d’acteurs de talent, avons envie de dire oui à un film un peu niais, un film dont on a un peu honte d’affirmer le potentiel comique et touchant car qu’il se rapproche plus d’un film « post-rupture difficile » ou « soirée pijama avec les copines » que du dernier Scorcese. Il ne fait pas donc bon dire qu’on a aimé « Bad Moms », mais, au diable l’avarice, osons.

Le pitch est donc bien simple, et propose une réflexion sur le statut de la mère dans la famille, sur son importance dans les petites tâches du quotidien qui ne se font pas toutes seules et sur les conséquences de leur libération domestique, de leurs retrouvailles avec une vie sans enfants, sans obligations parentales. On adore la scène dans le supermarché où Amy et ses copines (Kathryn Hahn, Kristen Bell) s’envoient des litres de vodka et des paquets de céréales colorées à pleine bouche – voir Mila Kunis engloutir des « Froot Loops » au ralenti est très clairement une des raisons pour laquelle on est heureux d’avoir vu le film. Révolution, démesure, provocation à outrance, tout cela culmine dans la scène de la fête dans la maison familiale, une sorte de Projet X (2012) version mamans : rues saturées de monospaces avec sièges pour enfants, verres de Chardonnay à foison, dégustation de crème chantilly par bombes entières… Une sorte d’autodérision se détache donc du film qui est conscient de présenter une insurrection un peu inhabituelle et très concrètement tabou, disons-le. Le jeu avec la surenchère s’inscrit dans une autre mesure et crée des situations comiques bienvenues : la réunion d’allaitement quasi-sectaire, les (sous-)vêtements d’Amy on ne peut moins sexy, la fameuse classe de zumba où on est la seule avec un gros training gris à ne pas être en rythme.


Mais au-delà d’un film pour mamans submergées par les trajets école-piscine-foot-violoncelle, cette soirée est un vrai cri du cœur, une révolution maternelle avec quelques accents de féminisme qui réjouiront un peu les plus militant(e)s d’entre nous. Dans la même idée, les trois personnages principaux sont certes trop unidimensionnels et figés, mais représentent malgré tout différents types de mamans qui toutes, à leur façon, font du mieux qu’elles peuvent avec la pression qu’elles subissent. Il est assez probable que ce film touchera plus les femmes que les hommes, mais que ces derniers ne se sentent pas hors-sujet, car « Bad Moms » c’est aussi plusieurs types de pères, qui ne sont pas des super-parents non plus, et qui rament de leur côté !

Réalisée par les scénaristes de « Very Bad Trip », cette comédie se décline ici au féminin et rappelle le trio masculin de Las Vegas, avec un même rythme de la narration et un même manque fréquent de subtilité et de légèreté. Néanmoins, il s’en différencie quelque peu malgré tout : en lieu et place d’un coma éthylique dont on retrace les heures pas à pas, on a affaire ici au besoin de rétablir les femmes en tant qu’êtres humains faillibles, de décrier les mères qui se doivent d’être parfaites et dissimuler leurs peines et difficultés. Bien qu’on se serait passé de quelques scènes où le kitsch et les clichés l’emportent sur une morale qu’on aimerait plus souvent voir au cinéma, on passe une heure et demie fort sympathique à observer les tribulations de trois femmes fortes, à compatir à leurs échecs, à leurs succès, à finalement vivre un peu la vie de maman sans avoir eu à acheter le berceau.

Réalisateurs: Jon Lucas, Scott Moore
Avec : Mila Kunis, Kathryn Hahn, Kristen Bell,
Distributeur: Ascot Elite Home Entertainment

 

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