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mardi, avril 16, 2024
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FFFH 2017 : au cœur de la manifestation et mon film du jour

Laurent Billeter
Laurent Billeter
Le 7ème Art, pour moi c'est tout une histoire, Plus qu'une passion, qu'une grande occupation, D'Hollywood à Bollywood, De Michael Bay à Jean Marais, Je me complais dans ce milieu fabuleux.

Avec 3 long-métrages en cette 3ème journée de ce 13ème FFFH (je sais, le chiffre 3 est récurrent) à Bienne, il est clair que le festival présente une programmation toujours autant enrichissante et surprenante.


Réalisatrice : Noémie Lvovsky
Comme tout évènement de valeur du genre, un court spot est présenté avant chaque projection. Cette année, le court-métrage retrace le souhait d’un couple qui cherche à rejoindre le Festival du Film Français d’Helvétie. Après quelques péripéties comme leur traversée en jet-skis sur le lac de Bienne, ils arrivent finalement à destination. Ce bref moment léger et rafraîchissant, prouve aussi que les organisateurs de la manifestation gèrent toujours très bien cette entrée en matière.

C’est ainsi que j’ai découvert leur présentation, soit juste un peu avant l’intriguant « Demain et tous les autres jours ». En plus du mystère régnant autour de ce titre, je me sentais plutôt curieux de le voir. Il relate l’histoire de Mathilde, une jeune fille de 9 ans qui vit seule avec sa maman. Cette dernière frôle toujours plus la folie. À tel point qu’elle avait même décidé de s’acheter une belle robe blanche pour fêter son alliance avec la vie. Beaucoup d’autres incidents lui arrivent, ainsi qu’à Mathilde en suivant sa mère, mais avant tout « Demain et tous les autres jours » est une belle histoire d’amour entre les deux femmes. À tel point qu’elle avait même décidé de s’acheter une belle robe blanche pour fêter son alliance avec la vie. Elle l’avait reçu en cadeau de la part de sa maman lorsqu’elle était dans un bon jour.

Demain et tous les autres jours

En fin de compte, le long-métrage de et avec Noémie Lvovsky est devenu mon coup de cœur du jour. Déjà au niveau du casting, car la comédienne susmentionnée et multi-tâches a très souvent une excellente sensibilité. Par exemple au travers de ses décisions pour la distribution des interprètes. Elle-même est parfaite en étant la mère malade et souvent irresponsable. Mais en plus de son jeu fascinant, elle a choisi avec justesse la jeune Luce Rodriguez qui incarne Mathilde. Ce duo magnifique est aussi bien plus surprenant qu’il ne paraît. Mais la touche finale et plus inattendue revient à la chouette et au comédien lui prêtant sa voix. Ce bel oiseau représente énormément de symboliques pour la jeune fille. Émotionnellement principalement, car la chouette guide très souvent l’enfant lui donnant ainsi un sentiment de bien-être et une meilleure sécurité. C’est ainsi en tout cas que le public peut ressentir une partie de leur échange. Car parallèlement, cette voix mystérieuse donne aussi l’impression que Mathilde ne fait que suivre ses instincts, devenant aussi peut-être folle à entendre des voix autour d’elle. Toujours est-il que ce splendide travail vocal revient au comédien Mischa Lescot. Grâce à lui, une sensation de doute indéniable s’installe au sein du public : et si la santé de Mathilde était davantage fragile qu’escompter ? Car en plus, leur forme de communication semble se ressentir par la télépathie… Il est donc naturel de s’interroger encore plus quant à l’aide réelle et mutuelle de ces deux êtres.

Hormis la première expérience cinématographique de Luce Rodriguez, les autres comédiens-iennes en ont déjà depuis plusieurs années. À commencer par l’actrice et réalisatrice Noémie Lvovsky qui s’était faite notamment remarquer en 2011 pour son touchant « Camille Redouble ». C’est également le cas pour Mathieu Almaric (« Barbara ») qui joue le père de Mathilde. Quant à Mischa Lescot, même s’il personnifie la chouette oralement, il a aussi de belles prestances en qualité d’acteur comme dans « Le Redoutable ».

Pour Noémie Lvovsky, « Demain et tous les autres jours » est un projet qu’elle a depuis longtemps en tête. Au travers de plusieurs de ses réalisations, elle choisissait jusqu’à présent de s’immerger dans l’adolescence. Mais avec sa récente œuvre cinématographique, elle change de registre et aborde l’enfance comme un conte inquiétant et dangereux. Le choix du casting a été aussi une longue étape plutôt éprouvante pour la comédienne. Déjà, au niveau de la future Mathilde, car Luce Rodriguez a été trouvée plutôt en fin de période, mais aussi quant au choix de l’oiseau. À la base, Noémie Lvovsky désirait tourner avec une corneille. Mais son regard se noyait trop avec son plumage et donc ses expressions ne se ressentaient pas assez au travers des caméras. C’est donc en faisant d’autres recherches qu’elle s’est sentie inspirée par la chouette revêche. Sa taille et son langage émotionnel, fort bien montrés dans le film, l’on finalement séduite.

Demain et tous les autres jours

Finalement, la nouvelle création de la cinéaste est brillante et très émouvante. Je me suis vite senti touché par cette fillette tentant de vivre sa vie tout en étant proche de sa maman. Mais surtout, j’ai beaucoup apprécié les moments magiques partagés avec elle et la chouette. Cette dernière est magnifique et, avec certainement la personne qui accompagne l’animal, rend très bien sa beauté et son mode de vie en cage ou sous la pluie. Qui plus est, « Demain et tous les autres jours » suit un fil rouge scénaristique bien constitué et logique, malgré cette folie (proche). Excepté pour la séquence clôturant la réalisation. Elle est peut-être un peu trop brouillonne et dévoilée brutalement. Et surtout inutile, car il aurait été plus intriguant de s’arrêter au plan où une porte se referme définitivement sur un lieu de vie commun. Il est aussi regrettable que le récit n’explique pas ce qu’advient de la relation entre l’enfant et sa chouette.

Malgré tout « Demain et tous les autres jours » et un superbe film poétique et empreint de magie. Effectivement, il s’adresse peut-être plus à un public plus féminin, mais la gente masculine saura aussi le discerner de manière positive.

Attention toutefois, car le long-métrage n’est pas un conte pour les jeunes enfants. Certaines scènes sont violentes et peuvent choquer les esprits. Certes, cela n’est nullement comparable à un film à grand budget des Etats-Unis par exemple, mais il n’en reste pas moins que la sensibilité est mise à l’épreuve et que l’empathie n’est pas la seule émotion à ressentir en le regardant. En dehors de cette approche, le public appréciant Noémie Lvovsky devant et derrière la caméra saura savourer ses valeurs ainsi que ses principes. Quant aux gens songeant aller voir une histoire d’amour entre une chouette et une petite fille, avec une méchante maman, vous verrez et éprouverez certainement beaucoup d’autres surprises durant « Demain et tous les autres jours ».

Les Grands Esprits

Réalisateur : Olivier Ayache-Vidal
Quelques heures après « Demain et tous les autres jours », je me rends à la prochaine séance qui me donnait d’emblée une impression de déjà-vu, mais qui aura aussi son charme et ses qualités. En effet, mon pressentiment s’est avéré juste, car « Les Grands Esprits » ressemble beaucoup à « Ecrire pour exister » sorti il y a un peu plus de 10 ans. Ce film américain relatait une professeure qui se retrouve à enseigner en banlieue défavorisée avec des étudiants catalogués comme violents, dangereux, cancres, et bien d’autres adjectifs négatifs. Mais grâce à sa détermination et l’écriture, elle arrive à les motiver et à leur faire apprendre ce qu’est la Shoah et à terminer un magnifique projet commun : écrire et éditer un livre.

Certes, « Les Grands Esprits » a une autre approche et plusieurs touches françaises qui le différencie. Mais l’idée de base reste la même. Un enseignant hautement qualifié se retrouve muté, à la suite de plusieurs évènements indépendant de sa volonté, dans une des banlieues françaises pauvres. Il redoute le pire et effectivement, beaucoup de problèmes surviendront durant son enseignement. Mais parallèlement, de belles choses arriveront également.

Toutefois et en dehors de cette comparaison avec le pays de l’Oncle Sam, le cinéaste Olivier Ayache-Vidal signe là sa toute première réalisation qu’est « Les Grands Esprits » avec réussite. Et ce grâce au succès de son court-métrage « Welcome to China ». Son film paraissant simple extérieurement, fut très ambitieux et intense pour le metteur en scène. C’est en effet en 2013 que ledit projet commence avec l’approche d’Olivier Vidal au cœur d’un collège en plein Seine-Saint-Denis. Le nouveau directeur de ce lieu public trouvant l’idée intéressante, le tournage se fit en ces lieux et avec les élèves afin de rendre ce film encore plus réaliste. Après environ 4 ans de préparatifs, le tournage débuta en 2016. A noter que dès le début de l’écriture, le cinéaste avait songé à Denis Polyadès (« La Mécanique de l’ombre ») comme l’enseignant muté malgré lui. Et surtout, il avait découvert le jeune au talent prometteur : Abdoulaye Diallo. Même si l’histoire n’est pas centrée sur son personnage, son interprétation d’adolescent rebelle et proche de la délinquance est très bien jouée. Fort à parier que la réalité est aussi et malheureusement, proche de la réalité. Il ne reste plus qu’a souhaiter au jeune comédien de continuer sur cette lancée et de se forger une belle carrière dans ce milieu.

« Les Grands Esprits » est un beau film qui explique, et non dénonce, les différences entre les strates étatiques des collèges privilégiés et plus démunis. Les étudiants sont certes mis au premier plan, mais les professeurs-es également avec leurs misères et problématiques pour gérer et passionner leurs classes. La ligne scénaristique est logique, réaliste et fluide. « Les Grands Esprits » n’exige pas auprès du public qu’ils prennent parti, positivement ou négativement, envers les deux formes de collèges et d’enseignements. Mais soyons véristes, les différences financières et matérielles n’aident en rien quant aux méthodes d’éducation. Plus l’argent est influent dans les nobles familles, plus le niveau d’études sera élevé.

Les Grands Esprits

Le sentiment de sympathie pour « Les Grands Esprits » se perçoit aussi au travers de l’interprétation de Bruno Polyadès. Comme il est membre de la Comédie française et que nombres de ses films sont plus souvent intellectualisés, il est amusant de le voir s’exprimer parfois dans le langage des cités. Par la même occasion, il prouve une nouvelle fois, sa polyvalence et son envie de jouer différemment. « Les Grands Esprits » est une réalisation pouvant être inspirante pour d’autres institutions scolaires de banlieues défavorisées. Même si beaucoup de jeunes adolescents râlent sur les principes, apprendre à lire et écrire sont une des bases importantes de l’éducation.

Clairement, « Les Grands Esprits » s’adresse à un large public notamment parce qu’il présente l’éducation comme une importance capitale. Nombre de personnes se reconnaîtront dans le fait d’être réfractaire en voulant apprendre à l’école, où lorsque des bêtises plus ou moins conséquentes se faisaient avec les copains. Peut-être même qu’une vague impression de retomber en enfance se ressentira. Mais avant tout, « Les Grands Esprits » donne de l’espoir et enhardira certainement les parents à ce que leur progéniture persévère leur scolarité et études.

Madame Hyde

Réalisateur : Serge Bozon
Quant à mon troisième long-métrage découvert durant le festival, il est malheureusement triste à noter que ce dernier frôle la catastrophe. Car même s’il réunit un très bon casting, il est très proche de ressembler à un téléfilm.

Une timide professeure de physique, Madame Géquil, est la risée de ses collègues et élèves au sein d’un lycée professionnel dans une banlieue française. Un jour en train de travailler dans son laboratoire, elle est foudroyée, mais en survit. Depuis cet incident, d’étranges phénomènes se produisent lors de son passage… Les ampoules électriques lâchent, la glace fond et elle n’arrive pas à comprendre pourquoi elle se sent si énergique.

L’idée de base de « Madame Hyde » est intéressante et intrigante. Le francisé du nom de famille tout autant. Pourtant, dès les premiers instants de la réalisation de Serge Bozon le ton ennuyeux est donné. Le casting au complet récite son texte comme dans un mauvais téléfilm. Les interactions sont inefficaces et manquent cruellement de panaches. Il est tout autant lamentable de percevoir les tremblements des caméras utilisés pour donner, probablement, l’impression que le numérique n’a pas été employé. Ou alors l’équipement technique ainsi que le cadrage étaient tellement mauvais qu’il a été impossible d’éviter ces légers mouvements agaçants et répétitifs.

Serge Bozon fait partit des rares metteurs en scène à distancer ses réalisations. Sa dernière en date « Tip Top », date en effet de 2012. Mais le cinéaste est plus connu pour être acteur comme ce fut le cas au sein du récent « La Prunelle de mes yeux ». Avec « Madame Hyde », il ajoute une thématique auquel il est plutôt inhabitué, le fantastique. Plus expérimenté avec la comédie, car son récent long-métrage est au final un mélange des deux genres, il retrouve aussi la comédienne Isabelle Huppert (« Dead Man Down ») en rôle principal.

Madame Hyde

Si « Madame Hyde » a gagné un prix au Festival du Film de Locarno en 2017 pour la meilleure interprétation féminine, il est très difficile de comprendre comment ce film plutôt insipide a pu obtenir si vite une récompense. Car même si Serge Bozon a su s’entourer de comédiens-iennes émérites, presque aucun d’entre eux n’arrive à remonter le niveau du film. En fait, seul Romain Duris (« Un Petit Boulot ») interprète un personnage avec une réelle valeur. Mais en dévoiler davantage reviendrait à trop le faire et à briser l’intrigue du film.

Une autre bonne initiative émane de « Madame Hyde » mais qui n’arrive pas à modifier sa platitude. En effet, le long-métrage est souvent haut en couleur au travers les tenues que portent les protagonistes. Mais ces beaux arrangements de l’équipe costumière sont peut-être trop effacés pour que les spectateurs soient réellement admiratifs de ces derniers. Il aurait été peut-être plus intéressant d’étaler cette folie colorée pour tous les protagonistes, même les secondaires.

À l’heure de la diffusion de « Madame Hyde » dans les salles du festival, il est difficile de définir si le succès sera au rendez-vous pour sa sortie prévue en 2018. Tout, comme il est délicat de s’interroger sur l’éventualité du public cible. En tout cas, le long-métrage n’est pas compatible pour les enfants et probablement que les adolescents le bouderont par manque d’intérêt et d’action. « Madame Hyde » n’est pas un film explosif ou intellectuel, bien que les réflexions scénaristiques apportent de la matière, mais il plaira au public appréciant les implications d’Isabelle Huppert. Et il est certain qu’il enchantera les adultes souhaitant passer un moment divertissant sans horreur sanglante ou suspens insoutenable.

www.fffh.ch

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